La pathogénèse du COVID 19 peut impliquer un mécanisme bien connu qui pourrait avoir des implications sur la maladie : celui des anticorps facilitants (ADE en anglais).
La pathogenèse de COVID-19 implique des mécanismes directement cytotoxiques et d’autres à médiation immunitaire. Un mécanisme supplémentaire peut jouer un rôle dans l’infection à COVID 19. L’entrée des virus et les dommages subséquents peut impliquer un mécanisme bien connu et que l'on appelle les anticorps facilitants (ADE en anglais). L'ADE est une cascade d'événements très connue dans plusieurs maladies virales (Dengue, Ebola ou VIH par exemple). Les virus voient leur pénétration dans les cellules hôtes facilitée par un mécanisme impliquant une interaction entre des anticorps non neutralisants (ou des composants du complément) et le virion. Les virions sont reconnus par les anticorps hétérotypiques d'une infection antérieure. Ces AC sont non neutralisants. Les complexes se lient ensuite au récepteur Fcγ à la surface des macrophages et intériorisent le virus. La réplication intracellulaire entraîne une augmentation très importante de la charge virale et un basculement fonctionnel des macrophages vers un profil sécrétoire pro-inflammatoire des cytokines, profil qui est probablement dans les cas sévères à la base de la symptomatologie présentée par les patients.
Ce phénomène, bien connu et décrit par F. Negro dans l’exemple de la Dengue, est extrêmement important non seulement pour la compréhension de la pathogenèse virale, mais aussi pour le développement de stratégies antivirales, notamment de vaccins. Il pourrait jouer un rôle important dans l’affection à COVID-19.
Citation(s)
F. Negro et al. Is antibody-dependent enhancement playing a role in COVID-19 pathogenesis? Publication Date: 16.04.2020, Swiss Med Wkly. 2020;150:w20249
https://doi.org/10.4414/smw.2020.20249
Commentaire
Cet article permet de mettre en avant la complexité de la réponse immune. Complexité qui nous incite à réfléchir sur la signification de la présence d’anticorps : une sérologie positive dans le temps veut-elle dire qu’il existe une immunité ? De plus, comme on peut le suspecter dans certains cas sévères la réponse immune pourrait jouer un rôle dans la pathogenèse de l’affection.
F. Negro prend l’exemple de la Dengue où l’aggravation des symptômes lors des récidives de l’infection est bien connue. Le mécanisme des ADE est primordial dans cette affection. Il existe quatre sérotypes du virus de la dengue, tous provoquant une immunité protectrice. Cependant, bien que la protection homotypique soit de longue durée, les anticorps neutralisants croisés contre différents sérotypes sont d’une durée de vie beaucoup plus courte et peuvent ne durer que 2 ans. Dans la Dengue, la réinfection avec un sérotype différent provoque une clinique plus sévère. Ici, les anticorps non neutralisants se lient aux virions, sont incapables de les neutraliser et ces complexes facilitent l'infection des cellules phagocytaires via l'interaction avec le récepteur Fc, dans une ADE typique. En d'autres termes, des anticorps hétérotypiques à des bas taux sont responsables de l'ADE chez les personnes infectées par un sérotype du virus de la Dengue différent de la première infection.
Cela a entrainé des effets considérables lors de l’introduction du vaccin (tétravalent) où les personnes séronégatives ont développé quelques années après vaccination des présentations cliniques sévères avec un taux d’hospitalisation supérieur aux non vaccinés. Cela était dû à ce phénomène ADE.
Dans le cas du corona virus ce mécanisme a été mis en évidence lors de vaccinations des chats. Ceux-ci peuvent être atteints d’une péritonite provoquée par un coronavirus. Plusieurs approches expérimentales ont démontré que dans le SARS-CO V2, responsable de l’épidémie de 2003 ce phénomène ADE existait.
L’ADE a été évoqué dès l’apparition du COVID-19. Il y a des arguments laissant suspecter des réactions croisées avec des taux d’AC bas d’anciennes infections de corona virus (soit des coronavirus responsables du SARS soit des Coronavirus liés à des affections bénignes comme le rhume).
Ce mécanisme des anticorps facilitant n’est pas certain dans le Cas du COVID mais s’il se vérifie cela va poser deux problèmes.
L’un sera de savoir quel type de réponse nous devrons donner en présence d’AC
Anti COVID19 : simple contact avec le virus ou immunité ? L’autre sera d’assurer l’innocuité d’un vaccin.