Analyse des données concernant l’épidémie de SARS-CoV-2 avant et après implémentation des mesures de distanciation dans 6 pays permettant de documenter l’efficacité et le rôle de ces mesures dans la mitigation de cette épidémie, et de commencer à évaluer le rapport coût/bénéfice de ces différentes mesures.
En l’absence de moyens prophylactiques ou thérapeutiques, la seule manière de mitiger l’épidémie est un ensemble de mesure de distanciation visant à diminuer la transmission de SARS-CoV-2. L’efficacité de ces mesures est évaluée par des simulations épidémiologiques et de rares expérimentations lors d’épidémies précédentes. Il est important de réévaluer l’efficacité de chacune de ces mesures de distanciation (e.g. fermeture des restaurants, restriction des voyages, etc) pour en mesurer le rapport coût/bénéfice. L’approche dans le présent papier consiste à calculer le taux de croissance de l’épidémie dans divers pays avant et après l’introduction de ces mesures. Les auteurs analysent ainsi l’impact de 1717 « politiques de mesures de distanciation » au niveau local, régional ou national en Chine, France, Iran, Italie, Corée du Sud et US. Après un gros travail de standardisation des statistiques de cas actifs ou cumulatifs, les auteurs peuvent calculer un taux quotidien de croissance des cas. A travers des sociétés très différentes qui influencent ce taux de croissance, la période avant intervention sert de contrôle par rapport à la période après intervention.
Le taux d’infection avant intervention de COVID-19 croît de 43% par jour en moyenne parmi ces six pays (5% d’erreur standard) impliquant un temps de doublement proche de 2 jours. Les estimations pays par pays varient de 34% par jour aux US (SE = 7%) à 68% par jour en Iran (SE = 9%).
En Chine, les auteurs disposent de suffisamment de données pour montrer l’effet progressif des mesures de distanciation au fil des toutes premières semaines. Globalement, les mesures de distanciation réduisent le taux quotidien de croissance d’environ 15 à 40% avec des valeurs négatives pour résultat.
Par leur décalage, dans certains pays, les données permettent d’estimer l’effet de mesures spécifiques, qui varie de pays à pays. Généralement, le confinement à la maison semble peu contributif, alors que des mesures telles que la déclaration d’un état d’urgence, l’interdiction des grandes manifestations, l’interdiction de voyager ont corrélé avec une forte réduction du taux de croissance dans certains pays.
Si on extrapole l’impact des mesures de distanciation à ces six pays, les auteurs estiment que ces interventions ont prévenu ou retardé de l’ordre de 62 millions de cas confirmés, correspondant à environ 530 millions d’infections au total.
Commentaire
Il s’agit de la première tentative à large échelle d’évaluer à l’aide des données épidémiologiques du début de l’épidémie de SARS-CoV-2 l’impact des mesures de distanciation sur la propagation du virus. Globalement, ces mesures ont eu un impact très important et ont permis d’éviter des catastrophes sanitaires d’une échelle difficile à concevoir. Au niveau de chaque pays, avec des populations dont la structure sociale et les mœurs varient, cette approche permet de raffiner l’évaluation du rapport coût/bénéfice de chacune de ces mesures, et de compléter et/ou vérifier l’information obtenue des modèles épidémiologiques.