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ISO 690 Nikolic, D., S., Campanelli, A., Toutous-Trellu, L., Balagué, N., Elias, B., Calmy, A., Produits de comblement du visage : dispositifs médicaux ou médicaments ?, Rev Med Suisse, 2012/335 (Vol.8), p. 747–753. DOI: 10.53738/REVMED.2012.8.335.0747 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2012/revue-medicale-suisse-335/produits-de-comblement-du-visage-dispositifs-medicaux-ou-medicaments
MLA Nikolic, D., S., et al. Produits de comblement du visage : dispositifs médicaux ou médicaments ?, Rev Med Suisse, Vol. 8, no. 335, 2012, pp. 747–753.
APA Nikolic, D., S., Campanelli, A., Toutous-Trellu, L., Balagué, N., Elias, B., Calmy, A. (2012), Produits de comblement du visage : dispositifs médicaux ou médicaments ?, Rev Med Suisse, 8, no. 335, 747–753. https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.335.0747
NLM Nikolic, D., S., et al.Produits de comblement du visage : dispositifs médicaux ou médicaments ?. Rev Med Suisse. 2012; 8 (335): 747–753.
DOI https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.335.0747
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Articles thématiques : Dermatologie
4 avril 2012

Produits de comblement du visage : dispositifs médicaux ou médicaments ?

DOI: 10.53738/REVMED.2012.8.335.0747

Injectable soft tissue fillers : are they medical devices or drugs ? Consequences for HIV lipoatrophy filling

Physical modifications associated to lipodystrophy syndrome in HIV+ patients remain a challenge for management, even in a well controlled chronic infection. Indications, evaluation and filling treatments of facial lipoatrophy are described. Many exogenous filling products are on the market and their use and tolerance profile better known. These medical devices should be closely followed in patients with chronic HIV infection.

Résumé

La prise en charge des troubles morphologiques, associés au syndrome de lipodystrophie des patients VIH positifs, demeure un enjeu dans le cadre d’une infection devenue chronique et bien contrôlée par les traitements antirétroviraux. Les objectifs, évaluation et traitements par comblements de la lipoatrophie faciale sont ici détaillés. L’expérience des produits de comblement issus de l’industrie cosmétique permet d’optimiser leur utilisation et de connaître leurs effets secondaires. Une amélioration de la prescription et du suivi de ces dispositifs médicaux est encouragée et particulièrement auprès des personnes ayant une infection chronique VIH.

Introduction

La lipodystrophie associée au VIH est un syndrome touchant jusqu’à 50% des patients sous multithérapie antirétrovirale active (HAART) au long cours.1,2 L’imputabilité de ce syndrome est surtout liée aux traitements antiviraux comme les inhibiteurs nucléosidiques de la reverse transcriptase ou encore les antiprotéases, mais la pathogenèse en reste encore largement inconnue.3 Ce syndrome est caractérisé par une atrophie du tissu adipeux sous-cutané en divers sites du corps (visage, fesses, bras et jambes) d’une part et par une hypertrophie adipeuse multisites (abdominale, tronculaire par exemple) d’autre part.4,5 S’y associent également des troubles métaboliques parfois sévères tels qu’une hypercholestérolémie ou un diabète. Ces perturbations métaboliques, parfois associées à la lipodystrophie, augmentent les risques de maladies cardiovasculaires.6 Les modifications physiques de l’image corporelle induites par la lipodystrophie sont ressenties comme extrêmement invalidantes ;7 elles sont fréquemment à l’origine de perturbations psychologiques et peuvent avoir un impact sur la qualité de vie.8

Afin de réparer la perte de substance due à la lipoatrophie du visage, des techniques de comblement par injections sous-cutanées sont proposées depuis plusieurs années – à noter qu’aucune de ces techniques n’est remboursée en Suisse par les caisses maladie. La présente revue s’intéresse aux différentes approches à disposition dans ce domaine et aux implications pharmaco-médicales qui en découlent.

La lipodystrophie : un syndrome à part entière

La lipodystrophie recouvre en fait toute une conjonction d’anomalies morphologiques et métaboliques aux expressions diverses, formant un ensemble qu’il convient de regrouper sous le terme de syndrome. Brièvement, nous rappelons que la physiopathologie de la lipodystrophie relève de mécanismes multiples et actuellement encore largement méconnus. Une atteinte toxique adipocytaire, des troubles de régulation de l’adipokine, de la 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase et de la production de cytokines pro-inflammatoires, des modifications dans les mécanismes de stress oxydatif ainsi qu’une toxicité mitochondriale ont tous été incriminés.9 La toxicité mitochondriale, associée aux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse, a été la cause la plus attribuée à la lipoatrophie périphérique et génère dans les formes pures et sévères, outre l’hyperlactatémie plasmatique, des signes cliniques tels qu’une neuropathie périphérique, une myopathie, une stéatose hépatique, une pancréatite, une lipo-amyotrophie, une acidose tubulaire rénale, une encéphalopathie ainsi qu’une acidose lactique. Le médicament le plus incriminé lors de signes de dysfonction mitochondriale est la stavudine, médicament actuellement très rarement utilisé en Suisse (moins de 1% des prescriptions), en raison justement de sa toxicité importante.

L’ensemble de ces modifications métaboliques aboutit à une fonte du pannicule adipeux sous-cutané, phénomène qui s’avère être le plus visible au niveau de la face, des bras, des jambes et des fesses. Au contraire, une lipoaccumulation s’installe elle aussi progressivement de façon prépondérante au niveau du tissu adipeux intra et extrapéritonéal, mais aussi de la région dorso-cervicale (bosse de bison) et des seins. Des accumulations de tissu adipeux au niveau du foie, du myocarde et des muscles ont également été rapportées.10 Les implications cliniques de la lipodystrophie liée au VIH sont d’ordre médical et psychosocial.

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Les patients lipodystrophiques ont une image d’eux-mêmes dégradée 7 et rapportent souvent un impact sur leur qualité de vie. L’accumulation intrapéritonéale de tissu adipeux semble jouer un rôle pivot dans la survenue des complications métaboliques telles que la résistance à l’insuline ou la dyslipidémie.11-13

En conséquence, tant les implications psychosociales que les répercussions strictement médicales ont favorisé la recherche d’outils préventifs et thérapeutiques contre la lipodystrophie. La prise en charge de la lipoatrophie faciale fait appel, avant tout, à une bonne évaluation des modifications morphologiques : en effet comme précédemment précisé, la plainte de la personne atteinte est subjective et exprimée spontanément lors de l’entretien médical « je n’ose plus me regarder dans le miroir », soit indirectement lors de l’évaluation de troubles anxio-dépressifs. Plus objectivement, le médecin traitant ou l’entourage proche peuvent aider la personne à définir chronologiquement la fonte graisseuse et sa sévérité. Elle survient à poids stable, à la différence des atrophies constatées lors d’amaigrissements marqués associés à des maladies graves (cancers, anorexie, sida). Le visage restant visible, le patient VIH pourtant bien contrôlé et bien portant cliniquement paraîtra « malade », ceci contribuant à la pérennité de la stigmatisation de l’infection : cachexie du sida qui hante de nouveau la personne séropositive sans sida. Plusieurs outils sont à disposition pour l’objectivation et le suivi de la lipoatrophie faciale.14 L’iconographie avec des clichés haute résolution est un bon outil pour le suivi de base. L’ultrasonographie est utilisée par certaines équipes comme aide dans l’évaluation des injections, la tomodensitométrie ou encore l’imagerie par résonance magnétique nucléaire n’ont pour leur part été utilisées que rarement dans le cadre d’études concernant les produits. Divers scores pour évaluer la présence et la sévérité de la lipodystrophie sont disponibles, le plus utilisé étant la lipodystrophy case definition.15

La toute première approche dans la prise en charge de la lipoatrophie périphérique réside dans un choix optimisé des antirétroviraux dès la première initiation de la multithérapie efficace, ou dans un changement des molécules les plus imputables (d4T, 3TC et AZT)16 chez un patient déjà traité dès qu’il constate des modifications physiques gênantes. L’autre approche consiste à réparer localement le défect graisseux et est malheureusement difficilement applicable aux membres ou encore au niveau de la région glutéale. A noter qu’aucune de ces techniques n’est remboursée par les assurances de base en Suisse ; à Genève, un hôpital de jour, permettant une prise en charge pluridisciplinaire de patients infectés par le VIH et sous thérapie antirétrovirale, offre la possibilité à des personnes concernées par la lipoatrophie faciale d’être incluses dans un essai clinique évaluant l’impact à long terme des produits de comblement à base d’acide hyaluronique.

Nous allons nous focaliser ci-après sur la description des produits de comblement et sur l’importance de leur surveillance.

Produits de comblement du visage : une grande variété d’approches

Afin de réparer la perte de substance liée à la lipoatrophie au niveau du visage, diverses techniques de comblement par injections sous-cutanées sont proposées. Ces produits sont utilisés à visée esthétique dans le monde entier et commercialisés par des firmes de cosmétiques. Toutes reposent sur un principe identique, à savoir remplacer le volume perdu par un agent volumateur. La plupart d’entre eux ont été utilisés aussi chez les personnes séropositives pour le VIH (tableau 1).

Tableau 1

Types et caractéristiques des produits de comblement commercialisés

Collagènes

Les collagènes d’origine bovine sont utilisés depuis près de 30 ans dans cette indication mais sont grevés de plusieurs désavantages dont une durée de vie brève (environ six mois) et un risque non négligeable de formations de granulomes.17 Par ailleurs, la fréquente apparition de réaction d’hypersensibilité impose la réalisation de tests de sensibilisation préalables avant leur utilisation. Des collagènes humains ont également été utilisés depuis quelques années comme produits de comblement.18 L’avantage de ce type de collagène est qu’il permet d’éviter les réactions d’hypersensibilité et ainsi la réalisation préalable de prick-tests. La durée de vie est la même que pour le collagène bovin et la formation occasionnelle de granulomes a ici aussi été rapportée.19

Acide L-polylactique

L’acide L-polylactique est un produit de comblement lentement biodégradable qui a reçu de la Food and Drug Administration (FDA), en 2004, une autorisation de mise sur le marché dans le traitement de la lipoatrophie liée au VIH. En pratique, toutes les démarches de prise en charge sont suspendues depuis mars 2008. En effet, sa composition en polymère synthétique en fait un produit à risque pour la formation de réactions granulomateuses à type de corps étranger, ainsi que pour la survenue de nodules persistants.20 Ses avantages résident dans sa durée de vie élevée (> 24 mois) et la survenue d’une correction volumique graduelle culminant six mois après injection. Des complications sévères à type d’infections tardives à mycobactéries ou des réactions anaphylactiques ont été rapportées. L’acide L-polylactique reste un agent volumateur très utilisé en France où son remboursement est garanti dans l’indication lipoatrophie.

Hydroxyapatite de calcium

Les microsphères d’hydroxyapatite de calcium représentent un produit de comblement alternatif lentement résorbable ayant une durée de vie maximale de douze mois. Cet agent volumateur a été utilisé avec succès dans la lipoatrophie liée au VIH, mais quelques cas d’induration à long terme ont été rapportés.21 Une migration à distance des microsphères semble également possible.

Paraffine

La paraffine, produit de comblement non résorbable, n’est plus utilisée de nos jours comme agent volumateur. Son utilisation a été compliquée par l’apparition de réactions granulomateuses majeures telles que le lipogranulome sclérosant, entité décrite dans le cadre de l’utilisation de la paraffine comme produit volumateur pénien.18 En tout état de cause, son utilisation est actuellement formellement proscrite mais le fait qu’il s’agisse d’un produit non résorbable implique que des patients ayant reçu de telles injections sont encore à risque de développer des complications tardives.

Silicone

Le silicone représente un autre produit non résorbable et est actuellement le volumateur le plus utilisé. Toutefois, des migrations de silicone à distance sont rapportées dans la littérature18 et un lien entre l’injection de silicone et la survenue de sclérodermies localisées a été suspecté.22 La survenue de réactions granulomateuses semble également fréquente.

Silicone et polyvinylpyrrolidone

L’association de silicone et de polyvinylpyrrolidone en suspension a également été utilisée comme agent de comblement. Le faible nombre d’études au sujet de cette association rend difficile toute interprétation. Tout au plus, on retrouve dans la littérature la description de réactions granulomateuses, semblables à celles rapportées avec le silicone seul.18 Il en va de même pour l’association des microsphères de polyméthylméthacrylate (volumateur non résorbable) et du collagène bovin. La présence de collagène non humain impose ici aussi la réalisation de prick-tests avant toute utilisation. La survenue de réactions retardées à distance de l’injection (24 mois) a également été décrite.23

Hydrogel de polyacrylamide

L’hydrogel de polyacrylamide est également utilisé comme produit de comblement permanent. La formation de granulomes et nodules est ici aussi fréquemment rapportée. Par ailleurs, la survenue de surinfections bactériennes en regard des nodules postinjections semble représenter un effet secondaire particulièrement redoutable de ce volumateur.24

Gel de polyalkylimide

Le gel de polyalkylimide est, pour sa part, reconnu comme pouvant induire de fortes réactions inflammatoires au site d’injection avec formation secondaire de nodules.25 Il ne semblerait toutefois pas y avoir de risque de formation de lésions granulomateuses avec ce produit de comblement non résorbable.18 Des infections tardives ont cependant été rapportées.26

Microsphères de polyvinylhydroxide

Un autre produit de comblement permanent disponible sur le marché est formé de l’association de microsphères de polyvinylhydroxide en suspension dans un gel de polyacrylamide. Ce composé est peu utilisé et il n’y a pas de donnée médicale à son sujet concernant de potentiels effets secondaires. Sa durée de vie serait d’environ neuf mois.18

Acide hyaluronique

Une alternative intéressante dans le domaine a récemment émergé et est représentée par l’acide hyaluronique. C’est un composé résorbable d’une durée de vie moyenne estimée à six mois qui correspond à un composant physiologique de la matrice extracellulaire du derme. Le fait que l’acide hyaluronique n’ait pas de spécificité d’espèce ou d’organe le rend totalement non allergénique.27 Ainsi, aucun test préalable d’intradermoréaction n’est nécessaire. Malgré son utilisation à large échelle, il n’y a eu que de rares descriptions de réaction d’hypersensibilité à l’acide hyaluronique.28 La seule complication majeure rapportée est l’apparition rare de réactions granulomateuses.29 Le développement ainsi que l’évolution des lésions granulomateuses liées à l’injection d’acide hyaluronique semblent toutefois pouvoir être prévenus par l’injection locale de hyaluronidase, une enzyme impliquée dans la dégradation de l’acide hyaluronique.30 D’autres complications plus rares d’ordre systémique ont été décrites ; il s’agit en particulier de scléromyxœdème généralisé,18 de sarcoïdose 31 ou de micro-épidémies d’infections à Mycobacterium chelonae,32 sans qu’il soit dans ce cas possible d’incriminer l’acide hyaluronique lui-même ou une contamination procédurale. Notre expérience, obtenue dans le cadre du suivi en hôpital de jour, spécialisé pour le syndrome de lipodystrophie et les comorbidités non infectieuses des patients VIH lipoatrophiques sévères, a permis de mettre en évidence une très bonne tolérance à l’injection sous-cutanée d’acide hyaluronique.33 Le protocole de comblement comprenait une injection initiale suivie d’une réinjection si nécessaire à un mois d’intervalle. Au total, 23 patients ont été suivis entre 2008 et 2011. L’âge moyen des patients était de 48,1 ans et l’index de qualité de vie a été mesuré à environ 53 à l’inclusion. 1 à 4 ml d’acide hyaluronique ont été injectés en une ou deux fois de chaque côté. Le suivi, entre un à trois ans, montre que près de 48% des patients avaient noté une fonte du volume initial tandis qu’environ 30% rapportaient la présence de nodules sous-cutanés aux sites d’injection. La tolérance après injection s’est pour sa part avérée excellente (91,3% de patients sans réaction immédiate (inflammation, hémorragie, surinfection)). 21,7% des patients ont malgré tout rapporté une asymétrie faciale persistant après injection. La satisfaction globale était toutefois élevée après injection avec un score de 73,7/100. Finalement, trois quarts des patients souhaiteraient être réinjectés avec de l’acide hyaluronique. Les résultats s’avèrent donc globalement encourageants avec une tolérance à l’injection excellente et un rendu esthétique satisfaisant chez la majorité des patients traités. D’autres études plus détaillées, incluant également une analyse par imagerie IRM, sont en cours afin de mieux évaluer l’évolution postinjection.

Combinaisons avec d’autres agents volumateurs

Des combinaisons d’agents volumateurs comprenant de l’acide hyaluronique ont également été évaluées. En premier lieu, l’association d’acide hyaluronique et de microparticules de dextranomère est désormais utilisée comme agent de comblement. Un seul cas décrivant une réaction granulomateuse a été rapporté à ce jour.34 L’association de fragments d’hydroxyéthylméthacrylate/éthylméthacrylate et d’acide hyaluronique est un agent volumateur permanent biphasique. Dans ce cas également, des réactions granulomateuses de type corps étranger ont été décrites.35 Des réactions plus rares à type de kératoacanthomes sont également possibles.36

Greffe adipeuse

La transplantation adipeuse autologue s’est pour sa part avérée difficile chez le patient atteint de lipodystrophie en raison, d’une part du manque de graisse sous-cutanée donneuse liée à ce syndrome, et d’autre part de la progression de l’atrophie graisseuse du tissu transplanté.

Les dermatologues et chirurgiens plasticiens ont ainsi, actuellement à disposition, un choix élevé de produits de comblement applicables, pour une demande de correction de marques de vieillissement cutané ou dans l’indication de « réhabilitation » ciblée à la lipoatrophie associée au VIH. Comme décrit ci-dessus, aucun composé n’est exempt d’effet secondaire. Certaines réactions, principalement dans le cadre de l’injection de produits non résorbables, semblent toutefois trop graves ou trop invalidantes pour pouvoir continuer à justifier leur utilisation. En tout état de cause, il semble préférable de privilégier des produits résorbables ayant une activité immunogénique faible ou nulle. En ce sens, l’acide hyaluronique représente un bon compromis étant biodégradable en l’espace de six à douze mois. La disponibilité d’un « antidote » à l’acide hyaluronique, à savoir la hyaluronidase, amène une sécurité supplémentaire dans l’emploi de cet agent de comblement.

De la notion de dispositif médical : implications pratiques pour le praticien dans l’usage des produits de comblement

Les produits de comblement rentrent dans le cadre de l’utilisation réglementée des dispositifs médicaux. Malheureusement pour les patients, aucune prise en charge n’existe en Suisse ni dans la majorité des pays européens. La relation de cause à effet de la maladie chronique est pourtant bien démontrée ainsi que les lourdes conséquences psychosociales et donc économiques. La Sécurité sociale française propose un remboursement pour les patients VIH mais uniquement pour le polyamide, qui n’est pas, en 2012, le produit le plus utilisé par les spécialistes du comblement.

Un dispositif médical est défini comme un instrument, un équipement ou un appareil destiné à être utilisé chez un patient à des fins de diagnostic, de prévention, de contrôle, d’atténuation d’une maladie ou d’une blessure mais également, et c’est ici le cas, à des fins de traitement. L’action principale d’un dispositif médical n’est par ailleurs pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques, ni par métabolisme, mais elle est essentiellement mécanique. Les produits de comblement décrits dans cette revue répondent à la définition d’un dispositif invasif chirurgical à long terme, puisqu’ils sont administrés de manière invasive dans la peau, à l’aide d’une seringue, et sont destinés à demeurer en place pendant une période minimale d’un mois. Ils répondent ainsi à la même règle de classification que les implants utilisés, par exemple, dans les opérations mammaires. Les dispositifs médicaux à visée de comblement sont issus d’une extension de l’utilisation des dispositifs médicaux de comblement des volumes corporels, utilisés à des fins reconstructrices dans le traitement de la lipoatrophie faciale.37 Les effets secondaires, liés à l’injection de produits de comblement, devraient être signalés selon les mêmes procédures que celles utilisées pour la pharmacovigilance. La seule différence réside dans la terminologie car l’on préfère ici le terme de matériovigilance. L’Institut suisse des produits thérapeutiques (Swissmedic) met à la disposition des praticiens des formulaires de déclaration concernant l’annonce des incidents graves liés à des dispositifs médicaux (figure 1).38 Il est important de relever que sont considérées comme incidents graves toutes les réactions immédiates ou retardées, que l’on peut mettre en lien avec une injection préalable de produit de comblement. Cela inclut donc également les réactions granulomateuses rencontrées de façon sporadique avec la plupart des produits rapportés dans le présent article. La topographie exacte des réactions ainsi que leur caractère stigmatisant doivent également être documentés. Il semble néanmoins que le nombre d’effets secondaires rapportés à l’organe de surveillance que représente Swissmedic soit relativement faible ; cela peut être dû soit à leur relative faible prévalence (d’autant plus que l’utilisation de dispositifs médicaux non résorbables semble désormais être l’exception plutôt que la règle), soit que leur annonce est encore rare du fait que les professionnels de la santé ne sont pas encore suffisamment sensibilisés aux procédures de matériovigilance.

Figure 1

Formulaire. Dispositifs médicaux annonce incident

Conclusion

La lipoatrophie faciale liée au traitement antirétroviral du VIH reste une problématique fréquente dans la population séropositive. L’optimisation des antirétroviraux et des traitements par injections compensent l’anomalie morphologique. Mais les injections, n’étant pas prises en charge par les assurances suisses, demeurent d’usage limité. Les praticiens en charge de ces patients restent confrontés à un vaste choix de produits dont les effets à moyen et long termes, au niveau des sites d’injection ou systémiques, sont étudiés selon des modèles éloignés des procédures de validation des médicaments. Les organismes nationaux de santé encouragent à rapporter rigoureusement tout événement associé à ces injections de comblement. Des études plus complètes incluant de grandes séries de patients, associées à l’imagerie médicale, voire l’histopathologie, permettront dans le futur de mieux connaître ces produits.

Implications pratiques

> La prise en charge des lipoatrophies faciales est demandée par les patients VIH positifs afin de retrouver une apparence moins stigmatisante et a été démontrée comme améliorant leur qualité de vie

> De nombreux produits injectables existent et ne sont pas remboursables par les assurances en Suisse, car considérés dans le domaine cosmétique

> Il en découle des errances d’indication et une absence de suivi sur les moyen et long termes qui, chez ces patients fragiles, ne sont pas dénués de risque

> Une utilisation de ces produits proche de celle des médicaments permettrait d’optimiser leur bénéfice et d’anticiper leurs effets secondaires

Auteurs

Damjan S. Nikolic

Service de dermatologie et vénéréologie

HUG, 1211 Genève 14

Alexandre Campanelli

Spécialiste en dermatologie et vénéréologie, Genève
ac@derma-ge.ch

Laurence Toutous-Trellu

Service des maladies infectieuses et Département de réhabilitation et gériatrie HUG
1211 Genève 14

Nicolas Balagué

Service de chirurgie plastique, Département de chirurgie, Hôpital du Valais
3960 Sierre
nicolas.balagué@hopitalvs.ch

Badwi Elias

Service de chirurgie plastique et reconstructive

HUG, 1211 Genève 14

Alexandra Calmy

Faculté de médecine, Université de Genève
1211 Genève 4
alexandra.calmy@hug.ch

Unité VIH, Service des maladies infectieuses, Hôpitaux universitaires de Genève
1211 Genève 14
alexandra.calmy@hug.ch

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