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ISO 690 Miserez, S., Chinet, L., Guardia, A., Matthys, F., Hagon-Traub, I., Réalité virtuelle : un outil utilisable en consultation diabétologique, Rev Med Suisse, 2018/58889 (Vol.14), p. 111–113. DOI: 10.53738/REVMED.2018.14.588-89.0111 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2018/revue-medicale-suisse-588-89/realite-virtuelle-un-outil-utilisable-en-consultation-diabetologique
MLA Miserez, S., et al. Réalité virtuelle : un outil utilisable en consultation diabétologique, Rev Med Suisse, Vol. 14, no. 58889, 2018, pp. 111–113.
APA Miserez, S., Chinet, L., Guardia, A., Matthys, F., Hagon-Traub, I. (2018), Réalité virtuelle : un outil utilisable en consultation diabétologique, Rev Med Suisse, 14, no. 58889, 111–113. https://doi.org/10.53738/REVMED.2018.14.588-89.0111
NLM Miserez, S., et al.Réalité virtuelle : un outil utilisable en consultation diabétologique. Rev Med Suisse. 2018; 14 (58889): 111–113.
DOI https://doi.org/10.53738/REVMED.2018.14.588-89.0111
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diabète
10 janvier 2018

Réalité virtuelle : un outil utilisable en consultation diabétologique

DOI: 10.53738/REVMED.2018.14.588-89.0111

Health-related emerging technologies are growing fast. The use of virtual reality in diabetes outpatient care still remains unprecedented, notably in Switzerland. Thus, the Programme cantonal Diabète led a pilot study to assess the feasibility of an immersive application in such an outpatient setting. Results emphasize that this device is practicable and useful in diabetes care. Patients and their relatives overall appreciate the game, each of them for specific reasons: playful quality, opportunity to « learn differently » or to exchange about the subjective experience. Furthermore, there is no restraint (age, language, educational level…) in the ability to use such a device, except for emerging technologies habit.

Résumé

L’utilisation des nouvelles technologies en lien avec la santé est en plein essor. L’usage de la réalité virtuelle en consultation diabétologique reste cependant un domaine inédit, notamment en Suisse. Partant de ce constat, le Programme cantonal Diabète a mené une étude-pilote, questionnant la faisabilité de l’emploi d’une application immersive dans le domaine des soins. Les résultats montrent que l’utilisation du dispositif testé est envisageable et utile. Le jeu est globalement très bien reçu par les patients et leurs proches, chacun y trouvant un apport spécifique : côté ludique, possibilité d’apprendre autrement ou encore de dialoguer sur le vécu subjectif. En outre, aucune des caractéristiques (âge, langue maternelle …) n’entrave la capacité d’utilisation d’un tel dispositif, si ce n’est l’habitude des nouvelles technologies.

Introduction

Dans le contexte actuel d’augmentation de la prévalence des maladies chroniques et de pénurie des soignants,1,2 la nécessité de développer de nouveaux outils d’aide à l’accompagnement thérapeutique est une préoccupation de premier ordre dans le système de santé suisse.3 A l’heure de la santé digitale (objets connectés, virtualisation et autres human enhancement) et d’un développement exponentiel des technologies de l’information et de la communication, l’utilisation de ces outils dans le champ de la santé devient omniprésente, à mesure que leurs apports se précisent. La réalité virtuelle a déjà démontré des effets prometteurs dans plusieurs domaines, notamment dans la santé mentale4 ou somatique.5 Malgré cela, son utilisation en diabétologie reste actuellement un domaine inédit en Suisse, et ses potentialités restent encore à découvrir. Se basant sur ce constat, le Programme cantonal Diabète a mené l’étude pilote « Implantation de l’application immersive Diabetes Immersive Simulation (ci-après : DIS) pour l’éducation thérapeutique et la sensibilisation au diabète », cherchant à questionner la faisabilité du dispositif et les apports potentiels de la réalité virtuelle pour les patients diabétiques et leurs proches.

Méthodologie

L’étude exploratoire s’est déroulée sur 5 sites, en collaboration avec l’Ensemble hospitalier de la Côte (EHC, dans les hôpitaux d’Aubonne et de Morges), le Réseau santé Haut-Léman (RSHL, sur ses sites de Vevey et de l’hôpital d’Aigle), ainsi que l’Association vaudoise du diabète à Lausanne. Le projet a été validé par la Commission cantonale d’éthique de la recherche sur l’être humain du Canton de Vaud (CER-VD) après soumission ad hoc. 36 participants de 14 à 75 ans ont eu l’occasion de jouer à l’application DIS et d’évaluer les diverses fonctionnalités proposées par le jeu, ainsi que de s’exprimer sur ses apports potentiels en termes d’apprentissage et de sensibilisation à la maladie. Le tableau 1 présente les caractéristiques des participants.

Tableau 1

Données sociodémographiques de l’échantillon

ET : écart-type.

Les participants ont été répartis en 3 sous-groupes : « jeunes diabétiques » (14‑17 ans), « adultes diabétiques » (18 ans et plus) et « proches » (14 ans et plus, le critère d’inclusion étant de « vivre régulièrement avec une personne diabétique »). Les passations commençaient par un entretien d’une trentaine de minutes, durant lequel les participants ont rempli successivement un premier questionnaire sur leur « profil diabétique » (comprenant des questions sur leurs connaissances et vécu de la maladie, ainsi que sur leur habitude des nouvelles technologies). Ils ont dans un deuxième temps joué à DIS (une à deux parties selon leur volonté), puis finalement répondu à certaines questions ouvertes ainsi qu’à un deuxième questionnaire afin d’évaluer leur expérience du jeu. Pour répondre à notre question de recherche principale, soit la faisabilité du dispositif, nous avons défini, avec l’appui de la consultation en méthodologie et bio-statistique de l’IUMSP, qu’un taux d’abandons (drop-out) de 10 % était le seuil d’acceptation au-delà duquel l’utilisation du jeu dans le cadre d’une consultation serait considérée comme inenvisageable (les abandons étant définis comme les personnes qui, durant le jeu, ont voulu arrêter de jouer sans reprendre la partie).

Le dispositif testé est composé d’une paire de lunettes de réalité virtuelle Samsung Gear VR, qui permet de se plonger au cœur d’un univers virtuel dont on fait partie intégrante. Le joueur se retrouve « dans la peau » d’une personne diabétique, qui doit s’efforcer de maintenir un bon équilibre glycémique alors qu’il mange et qu’il bouge. Pour y arriver, le joueur doit mesurer son taux de glycémie et ajuster son traitement. DIS a été développé par la société Human Games,c spécialisée dans les applications de réalité immersive. Le responsable des passations était chargé de guider les participants durant la partie expérimentale et de veiller à son bon déroulement.

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Les analyses effectuées s’articulent autour de deux axes. Premièrement, une approche statistique descriptive des variables chiffrées a questionné la faisabilité de l’utilisation de ce jeu dans un cadre de soins (calculs des caractéristiques de l’échantillon, du taux d’abandons, et des corrélations). Deuxièmement, une analyse thématique des réponses aux questions ouvertes a permis de mettre en évidence les apports potentiels que les participants voient dans un tel jeu (quels bénéfices et pour qui ?).

Résultats

Concernant les analyses quantitatives, sur les 36 participants qui ont joué à DIS, seuls 2 d’entre eux ont interrompu une de leurs parties sans vouloir recommencer ensuite, ce qui correspond à un taux d’abandons global de 5,5 %. Les deux personnes qui ont arrêté de jouer sans vouloir recommencer étaient âgées de 75 et 69 ans, et ont évalué comme nulle à très moyenne leur aisance avec les technologies. La raison invoquée de leur arrêt durant la session de jeu était une incapacité à manipuler le casque de réalité virtuelle. En outre, l’aisance dans le jeu est bien davantage liée à l’habitude des nouvelles technologies (r = 0,55) qu’au seul âge des participants (r = – 0,25). En revanche, la langue parlée ainsi que le niveau de formation n’apparaissent pas être un frein à l’utilisation de DIS.

Sur les 59 parties jouées, il y a eu 35 interruptions (arrêts avec reprise du jeu) réparties entre 23 personnes, généralement pour des raisons techniques de manipulation des commandes du casque.

Les coefficients de corrélation (tableau 2) ont été calculés parmi les patients sur les principales caractéristiques afin d’étudier les liens avec leur perception du jeu. On voit ainsi que l’envie de jouer est inversement liée au niveau de formation : les patients avec un niveau de formation inférieur indiquent avoir plus envie de rejouer à DIS. L’envie de jouer semble en revanche indépendante de l’âge. Par contre, l’envie de s’informer varie en fonction du niveau de formation mais aussi de l’âge : plus les patients sont jeunes et ont un niveau de formation inférieur, plus ils considèrent que DIS donne envie de s’informer. En outre, moins les patients disent surveiller leur glycémie, plus ils sont enclins à considérer que ce jeu peut aider à mieux gérer son diabète.

Tableau 2

Corrélations entre les caractéristiques des patients (n = 24) et leurs avis sur le jeu

DIS : diabetes immersive simulation.

L’analyse thématique fait quant à elle ressortir 2 principaux points d’intérêt pour DIS :

  • un intérêt suscité par le plaisir de jouer.

  • Un moyen d’apprendre autrement.

Concernant le premier point, la grande majorité des participants s’est montrée très intéressée par DIS. Ils évaluaient leur session de jeu comme plaisante et divertissante, et appréciaient particulièrement de pouvoir se mettre dans la peau d’une personne diabétique et de devoir gérer leur glycémie au moyen d’un jeu. Sur le fond comme sur la forme, nous avons donc pu constater un attrait et un plaisir indéniables pour ce jeu.

Quant au deuxième point, la plupart des participants nous ont fait part d’un réel enthousiasme quant aux apports potentiels du jeu. Selon eux, les bénéfices de l’apprentissage seraient principalement à envisager au moment du diagnostic et durant les premiers temps de la maladie. C’est en effet dans cette période que l’utilité de DIS pourrait être la plus grande, lorsque la personne atteinte de diabète doit apprendre comment gérer son taux de sucre au quotidien : alimentation, activité physique, contrôles glycémiques, injections d’insuline, etc. Toutes ces notions peuvent actuellement déjà être apprises au moyen de matériel didactique écrit et avec l’appui de soignants formés, mais plusieurs participants ont relevé l’intérêt de pouvoir « apprendre autrement », de manière ludique et amusante. Ceci permettrait selon eux, d’une part, d’éviter le sentiment d’être inondé d’informations, et, d’autre part, de rendre moins pesante cette étape par moments difficile à vivre qu’est l’« entrée dans la maladie chronique ».

Pour le groupe des proches, l’attrait principal mentionné est le fait de pouvoir expérimenter et se représenter la maladie. Plusieurs participants ont en effet répondu que pouvoir « se mettre dans la peau » et « comprendre ce que vit » le proche diabétique est un apport indéniable dans leur relation avec lui ainsi que dans leur compréhension de la maladie. Finalement, ils ont souligné l’intérêt de pouvoir apprendre à prévenir et réagir à des situations potentiellement dangereuses (par exemple les cas d’hypoglycémie sévère).

Discussion

En s’appuyant sur ces résultats, on peut considérer que le jeu immersif DIS peut être utilisé dans un contexte de soins tel qu’une consultation de diabétologie. Les bénéfices perçus se centrent particulièrement sur le fait d’apprendre autrement pour les diabétiques, et pour leurs proches, sur la possibilité de se familiariser avec la maladie.

La capacité à utiliser ce jeu semble liée avant tout à l’habitude des nouvelles technologies et peu à l’âge des participants. Ce constat doit selon nous inciter à l’optimisme quant aux possibilités futures, du fait que le nombre de personnes habituées aux nouvelles technologies est en augmentation. A ce sujet, on ne doit pas exclure que l’accueil favorable par les participants puisse être dû en partie à l’attrait de la nouveauté. Par ailleurs, l’aisance à jouer n’est liée ni à la langue ni au niveau d’éducation, révélant le potentiel de tels jeux face à l’augmentation des patients issus de la migration.

Si ce jeu n’a pas la prétention de simuler l’expérience subjective de la maladie, son intérêt réside plutôt dans la possibilité de mise en situation éducative contextualisée en fonction du joueur, permettant d’expérimenter la gestion du diabète au quotidien sans le risque de répercussions négatives d’une expérience faite dans la vie réelle.

Son apport pourrait aussi résider dans sa capacité de médiation des relations intersubjectives. Que ce soit entre soigné et soignant dans un contexte de soins, ou entre le patient et ses proches dans un cadre plus personnel, cet outil semble à même d’apporter un vrai bénéfice dans l’interaction entre ces personnes au sujet du diabète. Ce dispositif permettant à l’accompagnant de se mettre à la place du patient, il ouvre de ce fait la voie au dialogue quant au vécu subjectif de la maladie, un échange mettant momentanément soignant et soigné sur un certain pied d’égalité.

Limites

Cette étude comporte certaines limites : la version de l’application testée était encore en cours de développement et certaines difficultés de manipulation ont été constatées. Cela doit cependant inciter à l’optimisme quant aux possibilités futures du jeu. Il s’agit en outre d’une étude pilote sur un petit échantillon, qui constitue un premier pas inédit dans le champ de l’utilisation de la réalité virtuelle en diabétologie. De plus amples études seront donc nécessaires afin de préciser ses applications, et partant, les développements souhaités, et de clarifier son usage. Il est également important de relever qu’au vu du caractère précurseur de ce dispositif, il aurait été très difficile de se passer de l’appui d’une tierce personne qui fournisse explications et guidages.

Conclusion

Cette étude pilote confirme qu’un jeu de réalité virtuelle tel que DIS a un potentiel et constitue un apport spécifique pour la prise en charge du diabète. A l’heure où la pénurie de soignants et l’augmentation des maladies chroniques posent la question de l’accès à l’accompagnement thérapeutique, cet outil pourrait indubitablement participer à améliorer la prise en charge et la qualité de vie des patients diabétiques, notamment les migrants et les personnes avec un faible niveau de formation, tout en enrichissant la représentation que les personnes ont de cette maladie et en favorisant l’échange entre les divers acteurs.

Conflit d’intérêts :

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

Implications pratiques

▪ Un dispositif de réalité virtuelle est envisageable en consultation diabétologique

▪ En l’état, il est cependant impératif de l’utiliser sous la supervision d’une personne formée à l’application et à son utilisation

▪ Ses apports sont différents selon qu’il s’agit de personnes diabétiques ou de leurs proches

Auteurs

Sébastien Miserez

Programme cantonal Diabète, diabètevaud
Av. Provence 12, 1007 Lausanne
sebastien.miserez@gmail.com

Léonie Chinet

diabètevaud
Avenue de Provence 4, 1007 Lausanne
leonie.chinet@diabetevaud.ch

Alberto Guardia

Direction médicale, Centre hospitalier universitaire vaudois
1011 Lausanne
alberto.guardia@chuv.ch

Fabienne Matthys

Réseau santé Haut-Léman
Av. Général-Guisan 58, 1800 Vevey
fabienne.matthys@rshl.ch

Isabelle Hagon-Traub

Hôpital du Valais
1951 Sion
isabelle.hagon@gmail.com

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