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ISO 690 | Bonny, O., Chehade, H., Fellmann, F., Qanadli, S., D., Barbey, F., Polykystose hépatorénale : développements récents, Rev Med Suisse, 2010/238 (Vol.6), p. 454–459. DOI: 10.53738/REVMED.2010.6.238.0454 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2010/revue-medicale-suisse-238/polykystose-hepatorenale-developpements-recents |
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MLA | Bonny, O., et al. Polykystose hépatorénale : développements récents, Rev Med Suisse, Vol. 6, no. 238, 2010, pp. 454–459. |
APA | Bonny, O., Chehade, H., Fellmann, F., Qanadli, S., D., Barbey, F. (2010), Polykystose hépatorénale : développements récents, Rev Med Suisse, 6, no. 238, 454–459. https://doi.org/10.53738/REVMED.2010.6.238.0454 |
NLM | Bonny, O., et al.Polykystose hépatorénale : développements récents. Rev Med Suisse. 2010; 6 (238): 454–459. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2010.6.238.0454 |
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Autosomal dominant polycystic kidney disease is one of the most prevalent genetic diseases and every general practitioner may have to counsel these patients. The follow-up of the patients carrying the trait has changed substantially lately and new treatments have been developed and are close to get approval. We review here the new ultrasound diagnostic criteria, the place of the renal volumetry by MRI in the follow-sup, the place of the genetic molecular diagnosis and we discuss the pathogenesis and the future treatment that are in phase III clinical studies and will soon change completely the outcome of the disease.
La polykystose hépatorénale est une des maladies génétiques les plus fréquentes et le médecin de premier recours peut être amené à orienter ces patients. Grâce aux avancées récentes en recherches clinique et fondamentale, des traitements spécifiques seront probablement disponibles d’ici une année. Nous discutons ici les nouveaux critères diagnostiques de la polykystose, l’intérêt de la volumétrie rénale par IRM, la pathogenèse ainsi que les essais cliniques en cours.
La polykystose hépatorénale (PKD) est la plus fréquente des maladies rénales génétiques, avec une incidence de 1 : 800 naissances. Elle se caractérise par le développement de kystes au sein de divers organes : rein, foie, pancréas..., mais également par des manifestations non kystiques : anévrismes, valvulopathies cardiaques, diverticules coliques... Sa morbidité et sa mortalité sont liées principalement aux complications rénales et cardiovasculaires.1 La PKD est responsable d’environ 10% des cas d’insuffisance rénale terminale (IRT) dialysés ou transplantés, ainsi que d’un nombre important de cas d’insuffisance rénale chronique (IRC) suivis ambulatoirement.
La PKD est transmise sur un mode autosomique dominant ; elle est génétiquement hétérogène. Des mutations des gènes PKD1 (chromosome 16) et PKD2 (chromosome 4) expliqueraient respectivement environ 85 et 15% des cas. Si la pénétrance de la maladie est complète, son expression phénotypique est très variable, y compris au sein d’une même famille, suggérant l’intervention de facteurs génétiques et/ou environnementaux modifiants.
Le nombre et la précocité de l’apparition des kystes sont les principaux déterminants de l’évolution naturelle de la néphropathie, contrairement à la vitesse de croissance des kystes.2 Ces derniers peuvent se développer à partir de n’importe quel segment de tubule rénal. Leur croissance se fait par dédifférenciation et prolifération cellulaire, perte de l’orientation de la division cellulaire et transformation des cellules épithéliales tubulaires à vocation absorptive en cellules sécrétrices. A terme, moins de 10% de l’ensemble des tubules génèrent des kystes et cela même si toutes les cellules tubulaires sont porteuses de la mutation. Ceci suggère l’intervention d’un ou de facteur(s) déclenchant la kystogenèse. Des études récentes faites chez la souris suggèrent que la prolifération cellulaire induite par une ischémie pourrait être l’un de ces promoteurs.3
La croissance des kystes s’accompagne d’une inflammation interstitielle à l’origine d’une fibrose interstitielle progressive et secondairement de l’IRC. La destruction progressive de l’architecture de la medulla entraîne des troubles de la concentration de l’urine par résistance périphérique à l’effet de la vasopressine et la survenue d’une acidurie hypocitraturique contribuant à la formation de calculs rénaux chez certains patients.
Le déclenchement de l’IRC est difficilement prédictible pour un individu donné. En effet, chez la majorité des patients, l’élévation de la créatininémie ne survient que tardivement, alors que les reins sont déjà fortement déformés. Une fois l’IRC installée, la perte de fonction rénale est d’environ 5 ml/min/an. Le type de mutation (PKD1 > PKD2 ; mutations PKD1 proximales > distales), le sexe masculin, un épisode d’hématurie macroscopique avant 30 ans, une hypertension artérielle (HTA) avant 35 ans et/ou non contrôlée, constituent les facteurs déterminants de la vitesse de progression de l’IRC. L’âge d’atteinte de l’IRT est en moyenne de 54 et 74 ans, respectivement en cas de mutations PKD1 ou PKD2. Finalement, l’IRT concerne environ 70% des patients PKD1 à l’âge de 60 ans et la moitié des patients PKD2 à l’âge de 75 ans. Ce décalage entre la croissance progressive des reins et la stabilité de la créatininémie rend nécessaire la recherche d’un marqueur précoce de l’évolution de la néphropathie.
La relation entre le volume rénal total (VRT) et la fonction rénale a été récemment étudiée par un consortium (Consortium for radiologic imaging studies of polycystic kydney disease, CRISP). La mesure du VRT par IRM a été effectuée chez 232 patients PKD1 ou PKD2, non urémiques.4 A l’inclusion, le VRT moyen était de 1060 ± 642 ml, comparé à 196 ml chez des sujets sains. Après trois ans de suivi, l’augmentation moyenne du VRT était de 5,3% par an (p < 0,001) selon une courbe exponentielle et comparable entre les deux reins (figure 1) ; la mesure du volume kystique total suit la même croissance. Les patients avec un VRT initial > 1500 ml présentaient un taux de croissance et une baisse de la fonction rénale significativement plus marqués que les patients avec VRT initial ≤ 1500 ml et ceci indépendamment de l’âge. Ces résultats ont démontré l’intérêt du VRT en tant que facteur pronostique de la fonction rénale aux stades initiaux de la PKD et comme méthode d’évaluation de la réponse thérapeutique.
L’IRM, en raison de son innocuité et de sa reproductibilité, constitue l’examen de choix pour mesurer le VRT. Les images sont acquises dans le plan coronal en utilisant une séquence en pondération T2 permettant de créer, sans injection de gadolinium, un contraste entre le parenchyme et les kystes (figure 2). Le VRT est calculé après segmentation des reins sur chaque image (figure 2). La technique bénéficie d’une très bonne reproductibilité. 4-6 Cette méthode a été récemment mise en place dans le Département de radiologie du CHUV. Il est également possible d’acquérir les images IRM dans un centre périphérique et de les transmettre pour analyse au CHUV.
Le risque de transmission de la mutation de parent à enfant est de 50%. La mise en évidence radiologique des kystes reste l’élément clé du diagnostic, avec certaines limitations cependant : une apparition tardive des kystes (mutations PKD2) et la prévalence de kystes rénaux sporadiques dans la population normale.
Le dépistage se fait généralement par échographie en raison de son innocuité et moindre coût. Depuis 1994, on utilise les critères diagnostiques de Ravine, validés seulement pour la forme PKD1.7 Récemment, de nouveaux critères échographiques universels, indépendants du génotype PKD1 ou PKD2, ont été proposés par Pei (tableau 1).8 Ces critères ont une valeur prédictive positive de 100% chez tout sujet à risque :
entre 15 et 39 ans et porteur d’au moins trois kystes rénaux unis ou bilatéraux ;
entre 40 et 59 ans et porteur d’au moins deux kystes dans chaque rein ;
≥ 60 ans et porteur d’au moins quatre kystes dans chaque rein.
Il existe cependant, chez les sujets à risque entre 15 et 29 ans, un taux de 14% de faux négatifs, correspondant en majorité à des cas PKD2. Cette limitation est cruciale lorsqu’il y a lieu d’exclure formellement le diagnostic de PKD dans l’optique d’une transplantation rénale intrafamiliale à donneur vivant. Un diagnostic d’exclusion (valeur prédictive négative de 100%) pourra, par contre, être retenu en présence de ≤ 2 kystes chez tout apparenté de plus de 40 ans.
Ces critères ont été validés pour le diagnostic échographique. La sensibilité du CT scan et de l’IRM est supérieure à l’échographie, avec un seuil de détection de ≥ 0,3 cm de diamètre kystique comparé à ≥ 0,5 cm pour l’échographie. Ces techniques à haute résolution ont pour corollaire de détecter davantage de kystes sporadiques que l’échographie. Leur valeur prédictive négative est donc supérieure à cette dernière.
L’analyse génétique directe ou indirecte n’est pas proposée en routine. Les techniques actuelles rendent possible l’identification de la mutation causale dans environ 90% des cas. Une telle analyse, couverte par l’assurance de base, n’est pas encore à disposition en Suisse. Il est également possible de réaliser une étude indirecte afin de déterminer si un apparenté a hérité ou non de la mutation.
Les indications d’une analyse génétique sont :
le diagnostic prénatal : demandé par certaines familles sévèrement atteintes ;
la transplantation rénale intrafamiliale à donneur vivant : afin d’exclure la mutation chez un donneur potentiel jeune n’ayant pas de critères radiologiques de PKD ;
la confirmation d’une mutation de novo.
Le produit des gènes PKD1 et PKD2, les polycystines 1 et 2, sont des protéines transmembranaires exprimées de manière ubiquitaire dans l’organisme ainsi que dans différents compartiments intracellulaires. Ces deux protéines sont en particulier exprimées sous forme d’un complexe dans le cil primaire, une sorte d’antenne que possède chaque cellule afin de la renseigner sur son environnement extérieur (figure 3). Les cellules tubulaires détecteraient ainsi la présence du flux urinaire grâce à la flexion du cil produite par l’écoulement de la pro-urine, étape déclenchant une élévation du calcium intracellulaire.
Des études in vitro et chez l’animal ont permis d’identifier dans les cellules épithéliales parakystiques des perturbations de certaines voies de régulation qui ont permis de définir des approches pharmacologiques ciblées sur :
le calcium intracellulaire : son taux est abaissé dans les cellules épithéliales intrakystiques par rapport aux cellules normales ;
l’AMPc : son taux intracellulaire est élevé dans de nombreux modèles de PKD. La concentration abaissée de calcium intracellulaire et les anomalies de la concentration urinaire pourraient, en activant la production de vasopressine, élever l’AMPc ;
la voie mTOR : elle déclenche la prolifération cellulaire. Elle est suractivée dans la PKD.
Hormis les mesures de néphroprotection habituelles, indispensables, il n’y a pas encore de traitement spécifique reconnu de la PKD. L’espoir se concentre actuellement sur des substances pharmacologiques qui ont déjà été validées sur des modèles murins de PKD ou dans de petites études chez l’homme. De larges études prospectives sont en cours ou en voie d’être terminées. Elles sont axées principalement sur la croissance kystique (foie et reins) et concernent quatre types de substances et leurs voies de signalisation intracellulaires (figure 3 ; tableau 2).
Il s’agit du sirolimus et de l’évérolimus, qui sont déjà utilisés comme immunosuppresseurs en transplantation. Leurs effets secondaires sont ainsi bien connus : œdèmes généralisés, dyslipidémie, protéinurie, pneumopathie interstitielle aiguë, toxicité médullaire et risque d’infertilité. Les études en cours utilisent des doses inférieures ou équivalentes à celles utilisées en transplantation et semblent bien tolérées à court terme.9
V2R module le taux d’AMPc, qui est trop élevé dans les cellules parakystiques. Des études ont montré que le croisement d’un rat Brattleboro AVP/ (qui n’a pas de vasopressine) avec un rat porteur de la mutation PKD entraînait, chez les descendants PKD/AVP/, la quasi-absence de formation de kystes rénaux.10 Deux antagonistes spécifiques de V2R ont été développés (OPC31260 et tolvaptan) et sont testés dans de grandes études multicentriques. L’effet secondaire attendu du tolvaptan est l’hyperdiurèse avec un risque de déshydratation. La localisation de V2R étant exclusivement rénale, le tolvaptan n’a pas d’effet sur les kystes hépatiques.
L’octréotide est un analogue synthétique à longue durée d’action de la somatostatine. Une fois lié au récepteur de la somatostatine, l’octréotide, en inhibant la production d’AMPc, ralenti la croissance kystique. Ce médicament étant utilisé dans le traitement de l’acromégalie, ses effets secondaires sont également connus : troubles digestifs et risque d’intolérance au glucose. Dans une étude récente, le lanréotide a provoqué, après six mois, une réduction significative du volume de foies multikystiques dans le groupe traité comparé au groupe placebo. De même, le VRT a diminué de 1,5% dans le groupe traité et augmenté de 3,4% dans le groupe contrôle.11 Ces effets ont été confirmés par un autre groupe.12
Dérivé d’une herbe chinoise, Tripterygium wilfordii, le triptolide a de nombreux usages thérapeutiques en oncologie et en immunologie. Dans le cadre de la PKD, le triptolide, en normalisant le taux de calcium intracellulaire, inhiberait la prolifération cellulaire.13 Cet effet a déjà été démontré sur des modèles de souris PKD14et une étude clinique chinoise est en cours.
En cas de confirmation prochaine de l’efficacité de ces traitements chez l’homme, la prise en charge de la PKD pourrait être bouleversée. Au-delà de l’espoir légitime pour les patients et leurs familles, plusieurs années seront néanmoins nécessaires pour valider des protocoles thérapeuthérapeutiques (mono-, bi- ou trithérapies ? dosages ? effets secondaires à long terme ? durée des traitements ?…) et préciser leurs indications en fonction du stade de la néphropathie et de l’âge des patients (enfants ?). Cela passera également par la formation continue des médecins impliqués dans la prise en charge de patients PKD et l’information des patients (journaux ; associations de patients de type Association pour l’information et la recherche sur les maladies rénales génétiques (AIRG)).
> Le suivi de l’évolution de la PKD aux stades initiaux se fait par la mesure de la volumétrie rénale en IRM, sans injection de gadolinium
> Les nouveaux critères échographiques de diagnostic permettent de prendre également en compte les patients porteurs de mutations PKD2
> Les différentes études cliniques en cours, confortées par les études animales, vont probablement transformer cette maladie incurable en une maladie à morbidité amoindrie. Les effets de ces traitements sur les aspects non kystiques de la maladie resteront à explorer
> La place de ces différents traitements, leurs potentielles associations et les effets secondaires à long terme resteront à déterminer
> Les médecins de la consultation des maladies rénales génétiques du CHUV se tiennent à disposition pour tout conseil et demande de renseignement
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